Sur cette aquarelle gouachée de 1911, le peintre sarthois Aguilé représente le moulin à vent de la Vairie.... privé de ses ailes faute de grain à moudre. L'arbre tournant et le dispositif de rotation du toit sont encore bien visibles mais il y a alors bien 20 ans que toute activité meunière a cessé. L'industrialisation de la meunerie (désormais à vapeur) est passée par là ... Alphonse Daudet décrit dans une de ses célèbres lettres un moulin à vent qui fait résistance ! Que les minoteries industrielles se souviennent d'où elles viennent!
[...] Notre pays, mon bon monsieur, n’a pas toujours été un endroit mort
et sans renom, comme il est aujourd’hui. Autre temps, il s’y faisait un
grand commerce de meunerie, et, dix lieues à la ronde, les gens des
masnous apportaient leur blé à moudre... Tout autour du village, les
collines étaient couvertes de moulins à vent. De droite et de gauche
on ne voyait que des ailes qui viraient au mistral par-dessus les pins,
des ribambelles de petits ânes chargés de sacs, montant et dévalant le
long des chemins ; et toute la semaine c’était plaisir d’entendre sur la
hauteur le bruit des fouets, le craquement de la toile et le
Dia hue! desaides-meuniers... Le dimanche nous allions aux moulins, par bandes.
Là-haut, les meuniers payaient le muscat. Les meunières étaient belles
comme des reines, avec leurs fichus de dentelles et leurs croix d’or.
Moi, j’apportais mon fifre, et jusqu’à la noire nuit on dansait des
farandoles. Ces moulins-là, voyez-vous, faisaient la joie et la richesse
de notre pays.
Malheureusement, des Français de Paris eurent l’idée d’établir une
minoterie à vapeur, sur la route de Tarascon. Tout beau, tout nouveau !
Les gens prirent l’habitude d’envoyer leurs blés aux minotiers, et les
pauvres moulins à vent restèrent sans ouvrage. Pendant quelque temps
ils essayèrent de lutter, mais la vapeur fut la plus forte, et l’un après
l’autre,pécaïre! ils furent tous obligés de fermer... On ne vit plus
venir les petits ânes... Les belles meunières vendirent leurs croix d’or...
Plus de muscat ! plus de farandole !... Le mistral avait beau souffler,
les ailes restaient immobiles... Puis, un beau jour, la commune fit jeter
toutes ces masures à bas, et l’on sema à leur place de la vigne et des
oliviers.
Pourtant, au milieu de la débâcle, un moulin avait tenu bon et conti-
nuait de virer courageusement sur sa butte, à la barbe des minotiers.
C’était le moulin de maître Cornille, celui-là même où nous sommes
en train de faire la veillée en ce moment. [...]
Le secret de maître Cornille, Les lettres de mon moulin, Alphonse Daudet, 1869
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